L’histoire du Québec a été marquée par le mouvement des femmes. 35 ans après son apogée, le territoire québécois est toujours quadrillé de groupes de femmes. Leurs interventions se sont transformées au fil des ans, se muant en expertises : agressions sexuelles, violence conjugale, insertion en emploi, droits sociaux, représentation politique, entrepreneuriat au féminin, etc.
Dès ses débuts, le mouvement des femmes a dirigé ses demandes vers l’État québécois qui s’est peu à peu porté garant de politiques et de programmes en la matière, signant en 1997 avec le gouvernement canadien la Déclaration de Beijing. Cependant, les autorités régionales considéraient alors les groupes de femmes de leur territoire comme extérieurs à leur mission. Or le développement régional a été juxtaposé dernièrement à l’atteinte de l’égalité hommes-femmes et les tables régionales de groupes de femmes ont été associées à la structure de gouvernance et aux plans de développement régionaux.
Proprement québécoise, cette nouvelle configuration s’inscrit dans une tendance mondiale et soulève de nouvelles questions, dont celle du rapport entre le mouvement féministe et les autorités régionales. Jusqu’à tout récemment aveugles au genre, les interventions québécoises en matière de développement régional profitent-elles aux groupes de femmes? Dans quelle mesure et comment ceux-ci participent-ils aux débats et aux choix démocratiques de leur région d’appartenance? Les groupes de femmes acquièrent-ils un nouveau pouvoir d’influence à travers cette nouvelle structuration de la démocratie et de la citoyenneté régionales?
Ces questions nous sont apparues à la suite d’une démarche longitudinale d’observation participante auprès d’instances de gouvernance régionale au Québec et ont été confirmées par des entrevues exploratoires auprès de responsables de groupes de femmes en région. Y répondre de manière appropriée exige une analyse du contexte qui sera présentée dans la première partie de cet article de Denyse Côté et Camille Tremblay-Fournier publié en 2011 par la revue Recherches féministes (et dont une version adaptée a aussi été publiée en mai 2012 par la revue Développement social). Suivra une analyse de contenu des ententes spécifiques conclues autour de 2007 dans les 17 régions du Québec, puis une analyse préliminaire du phénomène.