Les femmes des Premières nations, les Métisses et les Inuites sont des membres du groupe démographique le plus dynamique du pays, constituant un peu plus de la moitié des 1,3 million d’Autochtones du Canada. Leurs histoires, passées et présentes, sont souvent inspirantes. En octobre 2006, afin de commémorer la place occupée par les femmes autochtones dans l’histoire du Canada, le thème du Mois de l’histoire des femmes est Femmes autochtones : Cap sur l’avenir.
La contribution des femmes des Premières nations, des Métisses et des Inuites a été et demeure exceptionnelle. Omises de nombreux livres d’histoire, la plupart de leurs réalisations sont toutefois passées inaperçues. Compte tenu des obstacles engendrés par la discrimination, la pauvreté et la violence - une réalité qui a commencé avec la colonisation - les efforts déployés par ces femmes n’en sont que plus exemplaires.
Dans toutes les sociétés autochtones d’avant la colonisation, hommes et femmes exerçaient des rôles sociaux différents, mais les femmes étaient respectées au même titre que les hommes et tenues en haute estime. L’arrivée des Européens en Amérique du Nord a profondément changé la vie des Autochtones. Des préjugés fondés sur le sexe ont vu le jour, qui ont eu une incidence profonde et négative sur les femmes autochtones et sur le rôle qu’elles exercent au sein de leur collectivité.
La discrimination fondée sur le sexe à l’égard des femmes des Premières nations a été officialisée en 1868, des mesures législatives décrétant alors que le statut d’Indien ne pouvait être transmis que par les hommes. Une femme des Premières nations qui mariait un non-Indien perdait donc, tout comme ses enfants, le statut d’Indien et le droit à de nombreux avantages.
Cette mesure discriminatoire a servi de technique d’assimilation jusqu’en 1985. Les modifications apportées à la Loi sur les Indiens, à savoir le projet de loi C-31, étaient alors mises en oeuvre suite à la contestation exercée en 1971 par Jeannette Corbiere Lavell, une militante ojibway. Le succès de cette contestation a permis de redonner aux femmes des Premières nations et à leurs enfants le statut d’Indien qu’ils avaient perdu.
À l’instar de Madame Lavell, bon nombre de femmes des Premières nations, de Métisses et d’Inuites se sont engagées dans la voie du progrès social ici comme ailleurs dans le monde. Le processus est lent et il reste de nombreux défis à relever, mais les efforts de ces femmes ont permis à d’autres femmes, à leurs familles et collectivités de connaître une vie meilleure, plus riche en possibilités.
Grâce à une tradition orale vivante, les Premières nations, les Inuits et les Métis partagent et transmettent leurs connaissances, leur culture et leur histoire d’une génération à l’autre. Jetons un coup d’oeil aux récits inspirants de quelques femmes remarquables.
• Victoria Belcourt Callihoo (1861-1966) a raconté sa vie dans les Prairies, jeune Métisse témoin des premiers traités conclus dans l’Ouest canadien, de la décimation des troupeaux de bisons et de la création de l’Alberta.
• En 1967, Mary Two-Axe Early (1911-1996), Mohawk de Kahnawake militante pour les droits humains des femmes autochtones, conteste la perte de son statut d'autochtone suite à son mariage avec un non-autochtone, lutte qu'elle gagne en 1985. En 1968, elle fonde Droits égaux pour Femmes indiennes (devenu Femmes autochtones du Québec).
• Olive Dickason (née en 1920) est une écrivaine métisse et une historienne de la vie autochtone. Elle est récipiendaire du First Nations Lifetime Achievement Award.
• Freda Diesing (1925-2002), artiste et sculpteure haïda, a été l’une des premières femmes autochtones à s’adonner à la sculpture sur la côte Nord-Ouest. Voir l'une de ses oeuvres.
• Matinen (Rich) Katshinak (née en 1927) est une chasseuse innue et la petite fille de l’un des derniers grands chamanes du Nord. Elle partage ses connaissances avec les jeunes afin de perpétuer les traditions. "Ma mère était l’une des grandes chasseuses. Moi aussi, je peux chasser aussi bien qu’un homme."
• Jean Cuthand Goodwill (1928-1997), membre de la Première nation crie, a défendu le dossier des services de santé publique pour les Autochtones et contribué à la mise sur pied de l’Aboriginal Nurses Association of Canada.
• Rita Joe (née en 1932) est une poète et chansonnière micmaque, récipiendaire d’un Aboriginal Achievement Award.
• Bertha Allen (née en 1932), membre de la Première nation Gwich’in, a toujours défendu les droits politiques des femmes autochtones et inuites. Elle est récipiendaire du Prix du Gouverneur général en commémoration de l’affaire "personnes".
• Alanis Obomsawin, Abénaquise, documentariste, chanteuse, artiste, éducatrice et militante (née en 1932) a réalisé de nombreux films et œuvré à l’ONF en tant que productrice, réalisatrice et scénariste. Elle a donné dans ses films un tableau sans compromis des réalités sociales auxquelles font face les Premières nations du Canada. Pour en savoir plus : Rebel with a Cause.
• Marion Ironquill Meadmore (née en 1936), de la réserve Peepeekisis en Saskatchewan, a été admise au Barreau du Manitoba en 1977, devenant ainsi la première femme autochtone avocate.
• Fille et petite fille de chef mohawk, l'illustre animatrice de la radio de Radio-Canada Myra Cree (1937-2005) est la première femme à occuper le poste de chef d'antenne au Téléjournal de Radio-Canada. Elle a été l'une des initiatrices du Mouvement pour la justice et la paix à Oka-Kanesatake et a soutenu le festival Présence autochtone depuis ses débuts en 1989. Pour en savoir plus.
• Maria Campbell (née en 1940) est une auteure, dramaturge et réalisatrice métisse reconnue. Elle publiait en 1973 l’inoubliable Halfbreed, qui jetait un éclairage neuf sur l’expérience métisse.
• Nellie J. Cournoyea (née en 1940), une femme inupik, a été élue à l’Assemblée législative des Territoires du Nord-Ouest en 1979, devenant la première femme autochtone à diriger un gouvernement.
• Ethel Blondin-Andrew (née en 1951) est membre de la nation dénée; elle est la première femme autochtone à siéger au Parlement et à faire partie du Cabinet fédéral.
• Sheila Watt-Cloutier (née en 1953) est une Inuk, la première femme à présider la Conférence circumpolaire inuite et une militante internationale dans le domaine des changements climatiques.
• Mary Ellen Turpel-Lafond (née en 1963) est membre de la nation crie de Muskeg Lake et diplômée de Harvard. Elle est devenue en 1998 la première Autochtone assujettie à un traité à être nommée à la Cour provinciale de la Saskatchewan.
• Susan Aglukark (née en 1967) est une auteure-compositeure inuk. Gagnante de trois prix Juno et du tout premier Aboriginal Achievement Award, elle est un mentor pour les jeunes Inuits et est aussi officier de l’Ordre du Canada.
Ce ne sont là que quelques-unes des femmes des Premières nations, des Métisses et des Inuites dont la vision, le courage et la compassion inspirent et enrichissent notre imaginaire collectif.
Sources : Dépliant de Condition féminine Canada, 2006 et Histoire des Autochtones au Canada
Pages reliées :
Le gouvernement d’Ontario présente le prix "Femmes chefs de file en développement communautaire", 18.10.2006
Entrevue avec Germaine Mesténapéo : une conteuse autochtone à la recherche de ses racines, Caroline Montpetit, 12.10.2006
Comme la dernière des Mohicans, Christiane Desjardins, 10.10.2006
Nation atikamekw : une première grande chef, 15.09.2006
Une entrevue avec Michèle Audette, Brigitte Verdière