Le 2 mai 2007 à Sherbrooke, Carmen Ducharme et Raymonde Plamondon de la Fédération des agricultrices du Québec (FAQ) présentaient un mémoire à la Commission sur l’avenir de l’agriculture et de l’agroalimentaire québécois (CAAAQ). Jean Pronovost, président de la commission, était étonné d'apprendre que les agricultrices ne sont propriétaires ou co-propriétaires que de 10% des 30,754 fermes du Québec. De plus, il y aurait au moins 10,000 agricultrices sans statut légal ni rémunération, un estimé jugé conservateur par la FAQ qui ne peut avancer de données plus précises à ce sujet, les dernières statistiques sur les agricultrices datant de 1981.
Au cours de la décennie qui a suivi l'obtention en 1986 de l'accès des femmes à la prime à l'établissement au même titre qu'un autre associé dès qu'elles détiennent 20% des parts de l'entreprise, beaucoup de femmes ont pu accéder à la propriété. Mais depuis 10 ans, pour avoir droit à cette prime de 15,000$, on exige un diplôme entre autres conditions. Résultat? Lors d'une rupture, les conjointes de fait quittent la ferme avec rien.
Selon le MAPAQ, il y aurait de 600 à 800 maissances chaque année parmi les agricultrices. Celles qui déclarent moins de 2,000$ par année en revenu, ce qui est le cas de la majorité des agricultrices, ou qui sont co-propriétaires d'une ferme au bilan négatif ne reçoivent rien du Régime québécois d'assurance parentale. Alors que papa a droit à 5 semaines de congé parental, sa conjointe n'a droit à rien du tout. Il n'est pas rare selon la FAQ qu'elles assument leur charge de travail jusqu'à quelques heures avant leur accouchement. Et comme les garderies ne répondent pas à leurs horaires atypiques, elles amènent leurs enfants à l'étable, ce qui accroît les risques d'accidents graves voire mortels. Ce n'est donc pas demain la veille que les jeunes producteurs agricoles masculins cesseront d'avoir du mal à trouver une conjointe (en 1971, 12% des agriculteurs québécois âgés de 18 à 35 ans étaient célibataires; en 2001, ce taux passait à 35%).
Par ailleurs, le rôle des agricultrices a énormément changé en réponse à la crise actuelle. En plus de s'occuper de la maison et de prendre soin des enfants, afin d'assurer la survie de la ferme familiale, souvent, elles occupent aussi des emplois rémunérés à l'extérieur tout en participant aux tâches agricoles. Et, selon une enquête réalisée en 2006 par la Coop fédérée, 59,2% des femmes éprouvent des sentiments de détresse alors que c'est le cas de 49,5% des hommes.
La FAQ recommande qu'on trace le portrait des agricultrices afin de mieux cerner leurs besoins, qu'on leur octroie une aide financière afin qu'elles puissent engager un employé lors d'un retrait préventif ou d'un congé parental et qu'on leur accorde un congé de maternité sans égard à leur statut légal et aux bénéfices de l'entreprise. Un crédit d'impôt remboursable pour frais de garde d'enfants serait aussi bienvenu. La FAQ souhaite également qu'on facilite l'accès à la propriété, offre des services de prévention de la détresse psychologique, tout en contribuant à augmenter les revenus des producteurs agricoles du Québec en identifiant leurs produits.
Rappelons que les audiences régionales de la CAAAQ se terminent les 19 et 20 juin à Gatineau.
> Enregistrement des audiences du 2 mai : l'audition de la FAQ est à 1h13
Pages reliées :
L’enjeu de l’actionnariat des femmes réapparaît, La Terre de chez nous, 25.10.2007
Toujours 10 000 agricultrices sans statut légal au Québec, La Terre de chez nous, 10.05.2007
Une vaste consultation sur l’avenir de l’agriculture et de l’agroalimentaire, ORÉGAND, 22.01.2007
Table ronde - Qualités de vie : aspirations et réalités des familles agricoles, 22.02.2007
La détresse des agriculteurs inquiète l'UPA, Radio-Canada, 18.01.2007
La politique agricole canadienne sous le regard des agricultrices, ORÉGAND, 13.07.2006
La détresse des producteurs, Radio-Canada, 09.11.2004
Au coeur des familles agricoles