Cet automne, l’Agence de santé de l’Outaouais tient une consultation régionale en vue de l’élaboration de sa planification stratégique triennale 2010-2013. Nous sommes 24 citoyen-nes de tous horizons qui veulent profiter de cette occasion pour alimenter le débat public et affirmer une vision commune de notre système de santé que nous voulons à la hauteur de nos ambitions collectives.
Un réseau participatif
D’entrée de jeu, nous constatons le faible intérêt de nos institutions de santé pour le processus démocratique. Le trop court délai de la présente consultation de l’Agence en témoigne. Pourtant la vitalité d’un individu et d’une communauté ne peut avoir d’égale que leur capacité d’influencer les décisions qui orientent l’avenir de nos institutions. Nous affirmons l’urgence d’un élargissement de l’espace démocratique au profit des citoyen-nes, des patient-es et des contribuables. Leurs voix doivent être entendues pour une gestion plus participative de notre réseau de la santé.
Un réseau public
L’accessibilité des soins pour tous et toutes est pour nous le socle de notre réseau de la santé. Sacrifier l’universalité aux mains du profit et du libre marché nous semble une « illusoire incantation » à laquelle nous opposons la solidarité devant la maladie.
De plus, nous craignons une montée des PPP sociaux (partenariats public-philanthropie) dans le financement, la prestation et la planification des services de santé et sociaux. Une telle influence nous fait craindre un retour de la charité arbitraire.
Autosuffisance régionale
L’offre de services en matière de santé dans la région ne suffit pas à répondre aux besoins de la population. Déjà il existait une volonté politique à corriger cette situation. Ce n’est plus le cas et aujourd’hui l’Agence planifie des ententes avec l’Ontario pour les services qu’elle n’est pas en mesure d’offrir.
À titre de quatrième municipalité du Québec, Gatineau a le bassin de population nécessaire pour offrir l’ensemble des services réguliers en matière de santé. Au lieu de négocier des corridors de services avec l’Ontario, l’Agence devrait réclamer auprès du gouvernement du Québec les moyens pour soigner la population de l’Outaouais chez elle.
Un réseau diversifié
La pénurie de médecins semble apparemment être la pierre angulaire des difficultés de notre réseau de santé. Ce diagnostic est fondé sur une vision « hospitalo-médicocentriste » qui nous entraîne dans un état d’attente du « médecin sauveur ».
Nous rejetons le monopole de l’approche médicale qui engendre une surenchère dont le corps médical seul semble bénéficier. Nous favorisons une approche multidisciplinaire dans la prestation, mais aussi dans la gestion, l’organisation et la planification des services de santé et des services sociaux. Cela permettra aux autres professionnel-les de la santé et des services sociaux de faire profiter l’ensemble des citoyen-nes de leurs compétences (infirmières, physiothérapeutes, dentistes, optométristes, travailleurs sociaux, organisateurs communautaires, etc.).
De plus, l’action communautaire autonome, qui a été à l’origine de petites et grandes transformations dans le réseau de la santé (création des CLSC entre autres), doit être davantage reconnue. Les organismes communautaires, malgré des ressources précaires et très limitées, ont un lien privilégié avec les communautés qu’ils desservent et leur apport à la santé et au bien-être de la région est incontournable.
La responsabilité des femmes à l’égard de la prestation des soins aux proches est encore aujourd’hui énorme. Le caractère volontaire de l’engagement des proches aidants nécessite que les politiques publiques s’adaptent à cette réalité.
Engagé dans la lutte contre les inégalités sociales de santé
Nous constatons l’absence de volonté de l’Agence à s’engager dans une réelle lutte contre les causes sociales de la maladie. En effet, si l’Agence n’hésite pas à combattre le tabagisme et l’obésité, elle demeure muette sur les causes profondes de ces maladies et de toutes les autres d’ailleurs.
Notons au passage que l’une des causes importantes de la maladie est d’origine sociale : c’est la pauvreté. Il existe d’autres déterminants sociaux de la santé : sécurité alimentaire, revenu, logement, éducation, participation citoyenne, etc. Le réseau de la santé est le témoin privilégié du résultat des inégalités sociales de santé. La longueur des listes d’attente doit donc être regardée comme un des indicateurs de notre santé collective.
L’existence des causes sociales de la maladie nous rappelle que chaque individu ne peut être entièrement responsable de sa santé. En effet, l’État a des responsabilités dans l’élimination de la part sociale de la maladie. C’est pour cette raison que nous réitérons que la santé est aussi un droit qu’il faut défendre.
Signatures :
François Marchand, Meghan Lewis, Bill Clennett, Maureen McMahon, Blanche Roy, Denis Bourque, Éloi Bureau, Mélanie Bourque, Dominic Foisy, Samuel Dubé Marceau, Vincent Greason, Michel Martin, Angèle Cadieux, Katherine Provost, Achille Joyal, Johanne Castonguay, Johanne Labine, Jacinthe Trudeau, Paul Belisle, Émilie Grenon, Emmanuel Dupont, George Labonté, Lorraine Legault et Marie Bélanger.
Page reliée : Une première consultation publique pour l’Agence de la santé et des services sociaux de l’Outaouais, info07.com, 05.10.2009