Le 5 novembre 2009, à l’occasion du lancement de son rapport de recherche intitulé La reconnaissance des diplômes et des compétences : difficultés et impacts chez les femmes immigrantes, Action travail des femmes (ATF), un organisme qui soutient les femmes dans leurs démarches pour accéder à l’emploi et qui lutte contre la discrimination des femmes au travail et à l’embauche, réitérait l’urgence d’agir dans ce dossier.
À ce propos, ATF souligne que les femmes immigrantes arrivées ces dernières années au Québec ont souvent une scolarité élevée par rapport à la moyenne québécoise. Cependant, elles demeurent moins présentes sur le marché du travail. Et quand elles y sont, leur salaire est généralement inférieur et leurs conditions de travail plus précaires. La recherche d'ATF pointe très clairement les difficultés et obstacles particuliers que rencontrent les femmes immigrantes diplômées à l’étranger en vue de faire reconnaître leurs acquis scolaires et professionnels obtenus à l’étranger.
Dans un premier temps, il ressort de l'analyse d'ATF qu'elles doivent affronter les effets d’une culture encore imprégnée par la division sexuelle du travail et par les préjugés à leur égard, en tant que femmes venues d’ailleurs et porteuses de cultures jugées «non modernes». À cet égard, un problème qui revient avec insistance dans les témoignages de la cinquantaine de femmes interrogées a trait aux traitements que leur réservent les intervenant-es ou agent-es d’emploi. Alors qu'elles sont pour la plupart très scolarisées, les informations transmises et les formations qui leur sont offertes sont plutôt destinées à une clientèle moins scolarisée.
De même, il est clair que les services mis en place pour assister les personnes immigrantes diplômées hors Québec dans la poursuite de leur démarche en reconnaissance des acquis et des compétences, et ultimement, pour qu’elles accèdent à un emploi qualifiant, ne répondent pas adéquatement aux besoins des femmes immigrantes diplômées. La formation, dite manquante et prescrite par les évaluateurs, viserait plutôt à les rediplômer, alors qu'elles détiennent déjà des diplômes sur la base desquels elles ont été sélectionnées par le Canada. Même s’il leur importe de procéder à une mise à niveau de leurs connaissances et de leurs compétences, ce n’est pas uniquement dans les institutions d’enseignement qu’elles considèrent pouvoir l’acquérir.
Pour contrer les obstacles qu’elles rencontrent en vue de faire reconnaître leurs acquis et leurs compétences, elles ont vivement exprimé la nécessité d’interventions qui les cibleraient directement et qui tiendraient compte de l’intersectionnalité des discriminations auxquelles elles sont confrontées. ATF a donc décidé d'initier la phase II de cette recherche, à savoir une intervention destinée spécifiquement aux femmes immigrantes diplômées à l’étranger en parcours de reconnaissance des acquis et des compétences.
De l’avis d’ATF, il est impératif que les différents acteurs gouvernementaux appliquent l’analyse différenciée selon le sexe (ADS) dans les diverses politiques publiques relatives à l’immigration et l’intégration socioéconomique des personnes immigrantes. Cela, de manière à prendre en considération les besoins spécifiques des femmes immigrantes afin de mettre en place des mesures et des outils qui y répondent. Ainsi pourront-elles non seulement faire reconnaître leurs diplômes, mais s’assurer également d’un accès équitable aux mesures d’insertion en emploi.
D'ici là, en l’absence d’outils rigoureux et de mesures transparentes de reconnaissance de leurs diplômes et compétences et dénués de toute forme de discrimination, elles demeurent extrêmement désavantagées par rapport à leurs congénères masculins. Pour elles, non seulement les difficultés liées à la reconnaissance des diplômes étrangers les maintiennent dans la pauvreté et la précarité, mais ces obstacles relèvent de surcroît de la discrimination systémique.
Sources : ATF, 06.11.2009 et RAC
Document relié : L'impact de la non-reconnaissance des diplômes et des compétences acquis à l’étranger : le cas des femmes immigrantes. Faits saillants, Action travail des femmes, septembre 2008