Le gouvernement canadien n’a pas apporté de réponse appropriée au problème de la violence faite aux femmes et aux filles autochtones, déclare Human Rights Watch dans son Rapport mondial 2014. Il devrait revoir sa décision de rejeter la nomination d’une commission d’enquête nationale sur cette question.
Les recherches de Human Rights Watch révèlent qu’en Colombie-Britannique, la Gendarmerie royale du Canada ne protège pas suffisamment les femmes et les filles autochtones contre la violence. La gendarmerie a également recouru à un usage excessif de la force et a commis des agressions physiques, des viols et autres violences sexuelles à l’encontre de femmes et de filles autochtones. Le Canada dispose d'inadéquats mécanismes de plaintes contre la police et de procédures de supervision inadaptées, et aucun mandat n’est prévu pour des enquêtes civiles indépendantes sur tous les graves abus policiers.
« Il faut que le Canada mette un terme aux violences indignes perpétrées à l’encontre des femmes et des filles autochtones, notamment par des personnes qui sont censées les protéger », a souligné Meghan Rhoad, chercheuse à la Division Droits des femmes de Human Rights Watch. « Le Canada doit mettre sur pied une commission d’enquête nationale et élaborer un plan d’action national pour garantir la sécurité des femmes et des filles autochtones. »
Dans son rapport, Human Rights Watch a évalué les progrès opérés en 2013 en matière de droits humains dans plus de 90 pays, dont pour la première fois le Canada.
En février 2013, le gouvernement fédéral a transmis le rapport de Human Rights Watch sur les mauvais traitements policiers commis à l’encontre de femmes et de filles autochtones en Colombie-Britannique à une commission des plaintes en vue d’une enquête. La commission, bien que dirigée par des civils, travaille souvent en étroite collaboration avec la police et n’est pas habilitée à émettre des recommandations contraignantes. L’enquête est en cours.
L’Association des femmes autochtones du Canada a recueilli des données révélant qu’au niveau national, entre les années 1960 et 2010, 582 femmes et filles autochtones avaient été portées disparues ou avaient été assassinées au Canada. 39% de ces cas se sont produits après 2000. Des données complètes ne sont plus disponibles depuis que le gouvernement fédéral a supprimé le financement destiné à la base de données de l’organisation, et les forces de police canadiennes ne recueillent pas systématiquement de données relatives à la race et à l’appartenance ethnique.
En avril 2013, plus d’une douzaine de pays ont soulevé le problème lors de l’examen périodique de la situation des droits humains au Canada par le Conseil des droits de l’homme des Nations Unies. Tant le Comité de l’ONU pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes que la Commission interaméricaine des droits de l’homme ont dépêché des délégations au Canada pour enquêter.
Après une visite effectuée en octobre 2013, le rapporteur spécial de l’ONU sur les droits des populations autochtones, James Anaya, a souscrit à l’appel en faveur de la mise sur pied d’une commission d’enquête nationale. Les provinces et territoires du Canada, l’Assemblée des Premières nations, ainsi que de nombreuses organisations, ont lancé des appels similaires. Les commissions d’enquête publiques nationales permettent de mener des investigations impartiales sur des questions revêtant une importance nationale.
Le Canada jouit généralement d’une réputation de défenseur des droits humains à l’intérieur de ses frontières et à l’étranger. Néanmoins, selon le rapport de Human Rights Watch, des mesures correctives doivent être prises par les autorités fédérales et provinciales sur un certain nombre de points, en particulier les droits des peuples autochtones, des populations affectées par les industries extractives du Canada à l’étranger, et des minorités ethniques et religieuses au Québec. Certaines mesures adoptées par le gouvernement fédéral – notamment la suppression de financements, les menaces de révocation du statut d’organisme de bienfaisance, et les contrôles intrusifs – amenuisent la capacité des associations indépendantes de préconiser le changement, entravant ainsi les progrès dans toute une gamme de questions relatives aux droits humains.
Source : Human Rights Watch, 21.01.2014